Automatonic Electronic Harmonics

Ven 13 Sep 2024 - 9:39

Octarine et Yve

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Le Référendum est passé, maintenant, Yve peut retourner se cloitrer dans les artères du vaisseau. Loin de la politique, loin des débats, loin des gens et du bruit de leur vie. Le nez dans les recherches, les yeux abîmés par le temps passé derrière un écran. C'est un miracle qu'avec tous les soucis de santé qui lui colle aux os, sa vue n'en soit pas un. Si ce n'est la fatigue au bout d'un moment, les paupières qui tombent, les ampoules qui grésillent et clignotent ; la caféine est ce qui lui permet de rester concentré. Mais voilà, toutes les bonnes choses ont forcément une fin. S'il se plait à dire que le temps est une construction sociale, et que sans soleil terrestre pour rythmer leur existence, les fins de journée arrivent malgré tout. Ou du moins, il y aura toujours un collègue inquiet pour le rappeler à l'ordre, le menacer de couper l'électricité, Gloria dans les parages pour l'extirper de son antre et étaler tous les derniers potins autour d'un verre. Il y aura toujours un « mais », un point de suspension dans ses tâches. Quand ce n'est pas son propre corps qui lâche.

C'est parce qu'il sait que son temps est limité qu'Yve gratte, creuse, dépasse toujours un peu plus les limites. C'est parce qu'il a conscience que peu le pleureront qu'il en profite pour continuer, avancer quoiqu'il arrive. Malgré la douleur dans les os, et l'arthrose qui s'installe péniblement. C'est parce qu'il en redoute les poussées qu'il continue ; tant qu'il tiendra plus ou moins debout, tant qu'il pourra réfléchir, tant qu'il pourra respirer, Yve ne s'arrêtera pas.

Alors prétendre que oui, il va rentrer, c'est les petits mensonges qu'il a appris à faire au fil du temps. Chez lui, c'est juste changer d'environnement de travail pour un autre. Son salon est un chaos sans fin de paperasse, de livres, de documents en tout genre. Des tasses de café et des cannettes de red bull partout, avec un canapé pourvu d'une couverture pour dormir quand il le peut. Il va si peu dans son lit que cela fait bien un an qu'il n'en a pas changé les draps.

Tout cela pour dire qu'Yve est blasé, saoulé, d'humeur massacrante, quand il consent à quitter son lieu de travail. Un sac sur l'épaule, un bras chargé d'une boîte en carton. On y retrouve des copies, des carnets, son ordinateur, quelques accessoires. La fatigue de la journée, l'aigreur dans le coeur, Yve soupire déjà. Et appuyé de tout son poids sur sa béquille, l'esprit encore embourbé dans ses dernières réflexions, il ne la voit que trop tard.

La fille, là. Celle qui avait pris la parole avec Hamal lors du Référendum. L'une des rares, dont l'objectif n'était pas d'investir et de gagner quelque chose des explorations. Le rappel de Borée, la clarté de l'explication. La tenue - curieusement, ce détail est resté en sa mémoire -, l'énergie. On peut le voir froncer les sourcils devant la jeune femme, comme s'il se réveillait doucement d'un long sommeil. Aujourd'hui, l'Azaraï n'a pas fait l'effort de parler à qui que ce soit. Le besoin de calme, la solitude si recherchée, le rend inaccessible.

Il y a un moment de battement, si bien qu'Yve se demande ce qu'il faut dire. La machine se remet en route, le cirque social doit se dérouler. Si elle est plantée devant lui, ce n'est clairement pas pour admirer ses cernes. Le petit bonbon acidulé plein d'énergie, face au vieux bout de caramel qu'on oublie dans le fond d'une poche.

Et de sa voix rocailleuse, où glisse son accent flamand, Yve dit :

« Oui, mademoiselle ? »

KoalaVolant

Lun 16 Sep 2024 - 13:53

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@Yve Van Hecke

Octarine avait enfin une journée de repos. Bien sûr, elle restait joignable sur l’Axiom pour ses collègues mais elle avait fortement insisté sur le fait qu’ils réfléchissent à trois fois avant de l’appeler et de se poser la question “est ce qu’il y a le feu quelque part et que le Mercure est la seule à avoir l’extincteur?”
Si la réponse était non, ils étaient cordialement priés de s'abstenir ou de se préparer à subir l’incendie qu’aurait mis Octarine en dédommagement.

Elle profita donc de cette journée pour aller se balader chez les Azarai. Enfin surtout chez un. Un café dans la main en guise d’offrande, elle avait été particulièrement contrariée quand le secrétaire du Dr Auverlot lui avait demandé si elle avait rendez-vous. Chacun avait pris le temps de prendre l’autre de haut. D’un côté le secrétaire, qui se demandait qui se pointait chez son thérapeute avec deux cafés à une heure si tardive, de l’autre Octarine qui trouvait scandaleux qu’on la prenne pour une patiente. Elle venait voir Sambre pour partager un café, une joute verbale et, si elle était chanceuse, un baiser volé. Pas pour parler de son syndrome de l’imposteur, merci bien.

Mais de toute manière, Sambre n’était même pas là. Ça lui apprendrait de venir à l’improviste chez le prince des rôdeurs.

Elle repartait donc d’un pas traînant, rôdant à son tour avec ses deux cafés en main quand elle entendit un bruit étrange. Un Toc régulier qui raisonnait dans le couloir. Ça devait être une déformation de Galéréis, de toujours tendre l’oreille à chaque petit couinement ou ronchonnement de Neo (et Borée savait qu’il ronchonnait). Il n’était pas rare pour les amis d’Octarine de se retrouver coupé dans leur phrase par un “Chut” impérieux tendit qu’elle se mettait à l’affut d’un chuintement qui lui semblait entendre et qui n’aurait pas dû être là. Après quelques secondes, soit elle s’excusait car elle avait rêvé, soit elle donnait un coup de pied précis dans un tuyau et le bruit cessait. Technique secrète de Galéréis.

Se tournant, elle se rendit compte qu’elle ne pourrait pas donner de coup de pied pour réparer ce bruit-là. Yve ne l’avait pas encore vu et elle hésita un moment. Elle ne connaissait du Cyclamen que son caractère “particulier”, le fait qu’il faisait pleurer les stagiaires et qu’il était à la bonne humeur ce que Gabriel était à la concentration.

Elle avait vraiment apprécié son intervention au référendum. Bon peut-être pas la partie où il parlait de buter tout le monde et où il mettait en doute l’existence de Borée, mais il avait validé ses propos. Ca l’avait particulièrement touché pour des raisons qu’elle n’avait pas encore bien identifiées (mais nous vous renvoyons au syndrome de l’imposteur susnommé).

Prenant son courage à deux mains, son sourire le plus brillant aux lèvres, elle se dirigea vers lui.

- Bonsoir Yve. Désolée si je ne vous serre pas la main, dit-elle dans un rire en désignant leur bras chargés à tous les deux.

Les rouages s’enclenchèrent derrière ses yeux verts, observant la boîte dégueulant de bazar d’Yve, qui semblait bien compliquée à ne porter que d’un seul bras. Sans chercher plus loin, sans même imaginer que le Cyclamen puisse le prendre mal, elle finit par désigner le chargement encombrant et un de ses cafés.

- On échange ? La rumeur raconte que vous êtes amateur de caféine vous aussi.

Elle n’attendit pas vraiment de réponse, qu’elle posait déjà un des gobelets sur le carton, le récupérait d’un bras et lui confiait en retour le second verre.

- Il est noir, je ne le bois que comme ça.

Elle tourna les talons pour repartir dans la direction où semblait se diriger Yve, de toute évidence prête à l'escorter, sans même savoir jusqu'où il allait comme ça. Certain appelait ça être sans gêne, Octarine appelait ça de la spontanéité.

- Je profite qu’on se croise pour vous remercier d’avoir pris mon parti pour le référendum. C’est rare qu’on écoute les Galéréis, encore plus qu’on les valide. Même lorsqu’on est Mercure… Certains de vos collègues très intelligents considèrent qu’on est bon à serrer des vis, pas à faire de la politique. Pas que ce soit complètement faux, mais on a aussi des choses à dire de temps en temps.

La navigatrice se rendit compte qu’elle était partie dans une longue palabre et se coupa d’elle-même, se rappelant soudain ses bonnes manières.

- Je ne suis pas sûre qu’on ait été présenté, au fait. Je m’appelle Octarine, je suis le Mercure du vaisseau.

Elle voulut une fois encore lui tendre la main, mais son petit échange de boîte ne lui permettait toujours pas ce mouvement audacieux. Quand elle s’en rendit compte, elle eut un rire amusé qui raisonna dans le couloir. Malgré ce qu’elle venait de dire sur toute la famille Galéréis, elle n’était pas toujours le tournevis le plus cruciforme de la boîte à outils.

(code) awona (icons) ethereal

Lun 16 Sep 2024 - 22:12

Octarine et Yve

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Yve peine à reprendre son souffle, tant les choses se déroulent bien trop vite pour lui. Si d'habitude il critique les autres pour leur lenteur cérébrale, il est le premier surpris de se voir perdre le nord. La jeune femme, le salut, les deux tasses de café dans les mains. Ses émotions jaillissent en feux d'artifice de couleurs et de mots. Il n'a pas le temps de refuser son geste qu'elle s'accapare ses affaires, si bien que sa mauvaise humeur augmente d'un cran. On le voit serrer la mâchoire, on l'entend grogner. On le voit gonfler la poitrine, et retenir un soupir. Voyez-vous, son humeur, ce sont des joints qui peuvent sauter. Facilement. Qu'il faut remplacer tout le temps. Parce qu'à partir du moment où plus rien ne sera retenu, Yve se montrera cruel.

Et il n'en sera pas désolé.

Ses yeux rétrécissent avant de se fermer. Inspiration, expiration, pourquoi n'a-t-il jamais essayé la méditation déjà ? Parce que cela ne marche pas quand le cerveau va à du cent à l'heure, saute d'idée en idée sans jamais s'arrêter. Il voit tous les efforts de la jeune femme - elle se présente, elle donne son nom, se rappelle à lui, semble s'agacer de sa condition ou bien d'être attristée de n'être considérée que comme l'une des petites mains du vaisseau.

Bon.

Yve a déjà réprimandé Gabriel une fois. Enfin non pas qu'une fois. À force, il est devenu maître dans l'art de dompter les trous noirs qui aspirent son énergie et voguent ici et là dans Néo. Les valides ne pensent pas à mal. C'est là son principal souci. C'est d'autant plus violent et fatigant qu'il doit contrer leurs bons sentiments.

La personne âgée qu'il est, enfermée dans la carcasse d'un bon trentenaire, se rapproche. Mercure. Oui, cela lui va au teint. Il la regarde, puis il fixe les tasses de café dont il est soudain devenu le parent. Un autre soupir.

« Pouvez-vous me rendre mes affaires, mademoiselle ? Il a oublié le “s'il-vous-plait”, tant pis. Il me semble ne pas avoir demandé votre aide. L'intrusion, la sensation de malaise ; il sait que si un jour quelqu'un souhaite lui faire une plaisanterie cynique, il suffira de lui voler sa béquille, et il ne pourrait rien faire. Concernant les miens, rassurez-vous, la politique ne nous intéresse pas. C'est surtout son cas, en théorie . Il peut vivre encore un peu, loin des utopies qui se transforment en cauchemar, tant qu'on lui réclamera pas de créer quelque chose de nocif. Son ton est sec à cause de son accent, il y a la lourdeur de la fatigue et du quotidien. Ou bien, vous souhaitez discuter ? Propose-t-il en désignant d'un signe de tête le bureau d'où il vient de sortir. Ah oui : enchanté. Avec un haussement d'épaules, puis il se détourne déjà pour revenir dans son antre. Il dira qu'il sera resté tard (grâce) à cause de la jeune fille. Vous étiez la seule personne à avoir dit un truc censé, les autres ont préféré tirer la couverture à eux. On croit souvent que le don d'Yve découle de son intelligence ; en vérité, il vient de sa capacité de reprendre ses idées en cours de routes. Si bien que cela paraît presque naturel de revenir là où Octarine s'est arrêtée. Rappelez-moi, Mercure, cela consiste en quoi ? »

KoalaVolant

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