Trying to be Nice. Bitchie Nice (Maeve)

Elle ne venait pas souvent dans la cafétéria du vaisseau. Et pour cause, elle avait pour habitude de manger seule dans ses appartements. Ou en compagnie d’elle-même. Ou de son siamois. Reagan. La seule connaissance et personne de confiance qu’elle avait sur tout le vaisseau. Mais ne sommes-nous pas mieux seul que mal accompagné ? C’est ce qu’elle croyait. Ou ce qu’elle se répétait à longueur de temps pour se convaincre. Va savoir.

Son regard balaye sans grande conviction les boissons présentés au quidam qui viennent se désaltérer ici. Rien qui ne saurait satisfaire son esprit critique et ses goûts d’autant plus exigeant. Elle avait développé un certain attrait pour les boissons importées d’Henillon. Sûrement le fait que ce soit une nouveauté dans sa vie. Qu’elle n’avait pas eu l’occasion de goûter jusque-là. Dans toute son enfance. Non pas qu’elle soit particulièrement gourmande, elle n’avait jamais pris le temps de s’intéresser à la nourriture. Et le thé qu’elle buvait était plus une habitude qu’autre chose. Un rituel qu’elle s’était imposée au cours des années.

Elle finit par jeter son dévolue, par défaut, sur ce qui semble être un café terrien. D’époque qu’il est écrit sur le petit icone de la machine. La moue qu’affiche son visage peine à la convaincre de la véracité de ces propos. Elle porte une première fois la tasse à ses lèvres pour juger de son choix. Affiche une nouvelle grimace avant de lâcher un soupir de lassitude. Disons que c’était sûrement le moins mauvais. Elle n’espérait pas trouver mieux ici de toute façon.

Une fois sa boisson entre ses mains, elle daigne enfin poser un regard sur l’assemblée. Vide au demeurant. Décidément, qu’elle choisisse de manger seule ou non. Le destin semblait lui avoir imposé cette vie. Elle s’assoit donc à une table, avec l’embarras du choix. Pour « déguster » ce qui lui sert de rafraîchissement chaud.

Avant même qu’elle n’ait le temps de se perdre dans ses pensées, un bruit attire son attention. En levant ses yeux, elle croise ceux de Maeve. Une connaissance qu’elle avait. Cette femme partageait son amour pour le silence et le concis. D’apparence froide. Encore un point commun. Elles se comprenaient sur plus de point qu’elle n’aurait aimé admettre.

A défaut d’autre compagnie, comme pour justifier cette sortie soudaine, c’est Reyna qui prendra la parole la première. S’adressant à sa camarade d’infortune.

Je t’offre une boisson si tu le souhaites.

Une invitation sans l'être. Une façon de partager plus que des croisements de regard. C’était également l’occasion de rattraper le temps perdu. Après tout, elles n’avaient pas souvent l’occasion de parler entre elles. Derrière cette fausse offre et ce cadeau qui n’avait rien d’un sacrifice pour le diamant Kramer. Elle tuait également le temps ainsi. Partageant ce moment de solitude avec une autre femme.

Comment se passe l’exploration ?

Sans vraiment savoir quel sujet aborder. De quoi discutent normalement les gens normaux ? Elle n’avait pas connaissance des discussions légères sur le beau temps et la température.

Pourtant, c’était sa façon à elle d’être sympathique. Pas grand-chose, presque hautaine et désintéressée. Mais c’était elle. Rien qu’elle, quoi d’autre. De quoi avait-on besoin, si ce n’est de la compagnie du plus brillant des diamants.

Elles auraient pu grandir ensemble. La jeune femme face à elle n’avait qu’un an de moins. Rien qu’un an d’écart les séparait. Faible distance qui était immédiatement comblé par leur caractère proche. Mais elle savait qu’au fond il existait un abysse entre les deux. Un gouffre sans fond crée par leur éducation bien trop éparse et différente. Des différences nées de leur enfance. Elle semblait pleine de rêves, d’aspirations, de désirs. Reyna quant à elle, n’avait rien de tout cela. Et c’était quelque chose qu’elle enviait fortement chez Maeve. Après tout, sa vie tout entière n’était qu’envie. Tout ce qu’elle a toujours désiré. C’était le désir justement.

Pourtant, elle n’était pas mécontente en cet instant, pas au point d’être heureuse de recroiser une connaissance de longue date. Presque amie. Elle était bien incapable de ressentir une joie aussi pure et désintéressée.

Joie qui, de toute façon, se serait envolé aussi tôt suite à sa première remarque. Qui lui arrache un roulement d’yeux à peine dissimulé. Suivis d’un « ça m’apprendra à faire un pas vers l’autre » grommelé entre ses dents presque inaudibles. Elle reprend bien vite sa posture droite et fière.

Ne me fais pas déjà regretter alors que nous ne nous sommes pas vus depuis un moment.

Un léger sourire se dessine entre ses lèvres, à mi-chemin entre le sarcasme et la sincérité. Avant de lui tendre une tasse similaire contenant cette mixture aussi désagréable que peu rafraîchissante. Maintenant qu’elle y repense, c’était toujours autant une honte de proposer ce genre de choses en libre-service.

Il parait que cette boisson était très populaire sur terre. Du café. Une forme légale de torture si tu veux mon avis. Mais je t’en prie. Accompagne-moi au billot.

Nouveau sourire qui pointe le bout de ses lèvres. Cette fois bien plus amusé que le précédent. D’autant plus que celui-là faisait preuve d’une sincérité sur la question presque trop franche.

Tes journées sont aussi passionnantes que les miennes visiblement ! La poussière en plus.

Elle ne pouvait retenir ses petites pointes de sarcasme en elle. C’est ce qui faisait tout son charme non ? C’est ce qu’elle croyait, et c’est ce que lui disait Reagan. Donc c’était sûrement vrai. De toute façon seul leurs avis comptent sur la question.

Pourquoi ? Tu as peur de prendre plaisir à une vie sur le vaisseau ? Loin des tempêtes, des avaries, des cris et du chaos extérieur d’une planète inhospitalière.

Sous ses airs médisants, sa question était légitime. Elle s’était toujours intéressée à cette passion qu’avait Maeve pour l’extérieur et l’exploration. Incapable de comprendre quel plaisir elle avait à risquer sa vie et son confort à l’extérieur. C’était d’ailleurs pour cela qu’elle s’y intéressait autant. Parce quelle ne comprenait pas comment elle pouvait avoir une telle passion, qui alimentait ainsi la volonté de cette femme.

Non il n’est pas là. Sûrement occupé à perdre son temps avec un Cervantes. Ou autre guignol si tu veux mon avis. Quoique c’est de l’ordre du pléonasme à ce stade….

Hausse les épaules, de façon presque imperceptible.

C’est l’occasion de se rattraper dans ce cas. Qu’as-tu à me raconter depuis tout ce temps. Nul doute que tu as eu plusieurs vies d’aventure à ton actif.