20 H 20 : Photographie (Hosily)

Tu n'as pas l'habitude de te rendre chez quelqu'un. Tu n'es pas à l'aise avec cette idée. Tu ne sais pas ce qu'ils en attendent, tu ne sais pas dans quel trou tu tombera. Métaphoriquement évidemment. Tu ne te déplaces pas sans un garde avec toi. Encore moins chez les Vaga. Tu n'es pas à l'aise avec cette idée non plus, peut-être même encore moins. Tu ne sais pas qui tu vas y croiser, surtout avec le référendum où tu n'as fais qu'allez contre eux. Tu es presque sûr de pouvoir sentir des regards sur toi mais tu serai incapable de savoir s'il sont tournés vers toi ou vers ton colosse protecteur.

Arrivé devant l'adresse, tu remercies ton garde et lui indique de retourner chez lui. Tu le recontactera lorsque tu sera prêt à partir. Tu sais qu'il n'en fera rien et attendra probablement derrière la porte ou quelques pas plus loin. Mais tu l'autorises à vagabonder. Tu n'es pas un monstre avec tes employés. Tu ne l'a jamais été. Construire un empire sur la haine mène au poignard.

Tu entres doucement après sa salutation. Tu souris, poli mais tu restes planté là pendant quelques secondes. Tu attends qu'il avance pour pouvoir le suivre mais il n'en fait rien. Tu étudies tes alentours sans réellement savoir où arrêter ton regard. Tu détestes cette sensation, l'inconnu. Tu ne supportes pas aller là où tes pas ne sont jamais allé. Cela t'angoisse. Te fait face à ce que tu ne peux plus faire.

Sa prise de parole tranche tes pensées au même rythme que sa silhouette tranche la brume. Quelque chose s'approche de toi. Si ta vision ne saurait dire quoi, ta logique raisonne rapidement. Délicatement, tu déposes ta main sur la sienne, proche de son poignet plus que de ses doigts. Sa fraîcheur te surprend mais te met à l'aise. Ta peau est froide aussi, le contact des autres est vécu comme une agression des sens. Celle ci l'est aussi mais beaucoup moins virulente. Presque appréciable.

- J'apprécie l'aide tant qu'elle née de praticité plus que de pitié.

Tu souris légèrement, poli, et te laisse emmener. Tu ne fais pas beaucoup de pas. Tu n'en es pas surpris mais tu ne peux t'empêcher de le remarquer. Loin de la démesure de tes quartiers. Cela te rassure presque. Moins de vide.
Tu l'écoutes parler. Tu continues de sourire avec politesse. Le sujet ne t'intéresse pas réellement, tu le considères comme hors de ta portée. Mais tu apprécies sa passion. Tu n'en as plus réellement en toi alors, quand tu es proche de quelqu'un en débordant, tu écoutes. Par presque nostalgie.

Il dépose quelque chose entre tes mains, après les avoir mentionné d'une manière qui t'a arraché un froncement de sourcil. Sa façon de s'exprimer te met mal à l'aise sans pour autant te rendre inconfortable. Tu es perplexe, gêné et sur le coup, tu veux presque partir. Mais tu restes. Tu ne bouges pas, pas même un doigt. Le poids de l'appareil se pose dans tes mains et la lenteur avec les siennes se sont retirées te prouvent qu'il n'aimerait pas le voir cassé. Tu pourrais lui en acheter des dizaines mais tu comprends que celui là est particulier. Alors tu le respectes. Tu restes immobile.

Sa façon de décrire est réaliste. Tu l'as appris depuis ces années. Tes autres sens ont commencé à se développer. La preuve étant, tu n'apprécies plus de toucher quelque chose sans annonce par exemple. Le surplus d'information t'indisposant.

Et puis, au milieu de ce discours de passion, il pose une question à laquelle tu t'attendais. Juste pas maintenant. Ta mâchoire se serre, légèrement. Mais tu te contiens. Tu clignes doucement des yeux et prends une voix posée, presque monotone.

- Presque éteinte. Et changeante. La vue que j'ai aujourd'hui ne sera pas celle de demain. Chaque jour emporte une partie de sa clarté. "Aujourd'hui", je suis en capacité de discerner des silhouettes. Quelques rares couleurs. La lumière ou le trop d'ombre floutent les lignes déjà brumeuses. Je peux discerner des lettres facilement reconnaissable si je focalise ma vue et l'approche de ma pupille. Le reste est impossible.

Tu t'arrêtes, ton pouce caresse légèrement l'appareil, apprivoisant certaines des textures.

- Votre passion est louable et je comprends certains aspects de votre point de vue. Mais je doute que la photographie soit un art à ma portée.